La culpabilisation coloniale conduit à l’humiliation religieuse

Comment comprendre les témoignages de reconnaissance pour faits de guerre à l’égard de la communauté musulmane présentés par les représentants de l’État français, qu’il s’agisse de la construction de la grande mosquée de Paris dans les années 1920 ou beaucoup plus récemment du discours du président de la République à l’occasion de l’inauguration du mémorial du soldat musulman en février 2014 ?

L’État français socialiste s’est exécuté en février 2014 devant une revendication de la communauté musulmane exprimée dans l’article 19 de la Convention citoyenne des musulmans de France de juin 2014 : « Les musulmans demandent la reconnaissance et le respect de la mémoire de leurs coreligionnaires tombés sur le champ d’honneur pour que la France soit libre et le demeure. »

À vrai dire, j’ignorais que la France eût une dette à l’égard de l’islam au titre de sa défense et de celle de la liberté. Si c’est le cas, elle en a certainement une à l’égard du judaïsme, et surtout du christianisme, puisque les chrétiens sont tombés par centaines de milliers et même millions (compte tenu du fait que la France est historiquement chrétienne) pour la défense de ce pays. Soyons sérieux car le sujet est grave : la France n’a aucune reconnaissance particulière à avoir à l’égard de l’islam : elle n’en a que vis-à-vis des individus qui se sont battus pour elle, quelle que soit leur origine.

Qui plus est, quel sens donner à cette demande de la communauté musulmane formulée dans la Convention de juin 2014 sachant le président de la République l’avait déjà satisfaite en février 2014 ? Ne fallait-il pas remplacer dans la Convention le terme « demandent » par « ont obtenu » pour être plus fidèle à la réalité ? Que signifie réellement le maintien de cette revendication dans cette Convention ? On pourrait être tenté de croire que la « Soumission » a déjà commencé si l’on veut être un brin provocateur.

L’État peut tenter de favoriser, c’est son rôle au travers du ministère de l’intérieur et des cultes, et c’est tout à fait souhaitable, la bonne entente entre communautés religieuses au travers de témoignages et d’échanges équilibrés vis-à-vis de chacune d’elles. Mais le fait-il dans ce cas précis à bon escient ? D’ailleurs, il me semble difficile de maintenir la neutralité qui s’impose dans l’exercice de la responsabilité politique si l’on proclame, comme le premier ministre, être « lié de façon éternelle à la communauté juive et à Israël ». (cf.  Manuel Valls)

Il est certain que des musulmans se sont effectivement battus auprès des Français dans les 150 dernières années, mais ils ne se sont pas battus aux côtés des chrétiens, des juifs, des agnostiques, des athées… mais aux côtés des Français, et ils ne se sont pas battus parce qu’ils étaient musulmans mais parce qu’ils appartenaient aux colonies françaises et, un certain nombre, de fait, étaient musulmans.

Le président de la République a déclaré en février 2014 : « S’en prendre à une mosquée (…), comme s’en prendre à une église, à une synagogue, à un temple, c’est s’attaquer à l’ensemble de la communauté nationale. » Eh bien non, c’est s’en prendre à des communautés spécifiques, respectivement les musulmans, les catholiques, les juifs et les protestants. C’est justement parce que, aux yeux de certains, ces communautés cristallisent symboliquement des problématiques bien spécifiques [1] (voire plusieurs à la fois) qu’ils s’en prennent à elles.

[1] En ce moment, plutôt : l’intégration pour les musulmans, l’opposition au mariage homosexuel pour les catholiques, et la politique d’Israël vis-à-vis des musulmans en Israël pour les juifs.

Mais que, de fait, s’en prenant à elles, ils ne respectent pas la loi française, n’a rien à voir avec une volonté de s’attaquer globalement à la nation française par une atteinte aux lois de la France, contrairement à ce que montrent à l’évidence les propos de jeunes de certaines banlieues, devenues des territoires hors droit et où la police n’ose parfois même plus aller, et qui manifestent sans ambiguïté leur rejet du modèle de société français dans son ensemble. Dans ce dernier cas, effectivement, on peut parler d’attaque de la communauté nationale.

Il semble d’ailleurs assez curieux de faire référence dans ce contexte au principe de respect des croyances de chacun, « inscrit depuis deux siècles dans la déclaration des droits de l’homme et du citoyen », dans la mesure où la plupart des pays musulmans n’adhèrent pas dans la forme ou dans les faits à cette déclaration et lui substituent d’autres principes issus d’autres déclarations .

Nos monuments aux morts portent la mention « morts pour la France » et non « chrétiens morts pour la France » ou « juifs morts pour la France ». Si la France peut se sentir redevable envers tous ceux qui se sont battus pour elle, en quoi l’islam (ou toute autre religion) a-t-il quelque rapport avec la défense de la France ? Témoigner une reconnaissance institutionnelle à une religion plutôt qu’aux individus, aux familles, qui ont souffert pour la France n’est-il pas maladroit, déplacé, voire choquant ?

Témoignons de la reconnaissance à ceux qui le méritent. Pour le reste, cessons cette repentance permanente dans laquelle la France se complaît depuis une trentaine d’années et voyons aussi tout ce que la France a apporté au monde et aux anciens pays colonisés. Il est temps que la France abandonne sa contrition masochiste, dans laquelle se délecte l’intelligentsia post soixante-huitarde, adepte de la déstructuration et au fond de la destruction des valeurs (destruction freudienne et enfantine provoquée par un vouloir totalitaire jouissif qui ne parvient pas à se maîtriser), et que la France retrouve un peu de fierté, sans pour autant tomber dans l’arrogance.

Discours memorial du soldat musulman

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